Evaluer votre niveau à l’aquarelle
D’abord pourquoi s’évaluer ? Et bien sans doute pour savoir comment mieux progresser, pour montrer ses oeuvres, savoir en parler avec d’autres, savoir quel tuto regarder pour être efficace… Je ne traiterai pas ici de la question de devenir pro ou pas ou d’être un artiste ou pas… J’adresserai juste ici ce type de questions que certains se posent : quel débutant suis-je ? Est-ce ce que je fais en tant que débutant, c’est pas mal ? Comment savoir que je ne suis plus un débutant ? Et si je ne suis plus débutant, où est-ce que j’en suis ? Est-ce que je suis un “avancé”, un “expert”, un bon aquarelliste ? Houla, attention introspection !
Prenons les questions dans l’ordre 🙂
Quel débutant suis-je ?
Il y a plusieurs sortes de débutants à l’aquarelle. Je vais tenter de vous faire une sorte de mini analyse 🙂 Je simplifie nécessairement hein, attention, il y a une complexité humaine qui ne souffre pas de la simplification. Mais un peu de “classification” nous aide souvent à nous situer.
Je constate que les “débutants” ont différents objectifs. Ceux qui sont prêts à apprendre un peu de technique, intéressés par le medium en lui même, nous les appellerons les “apprentis“. Et ceux qui veulent faire quelque chose de joli, tout de suite, les “finalisants”. Le débutant qui se fait accompagner par un professeur ou un tuto est plus ou moins apprenti et très souvent finalisant. Si le résultat du finalisant n’est pas au rendez-vous, il va abandonner rapidement et ne pas être satisfait de son progrès dans la maitrise du medium. L’apprenti, pour peu qu’il soit passé par quelques bons cours ou tutos de “technique de base”, pourra refaire un exercice jusqu’à une certaine maitrise et ce progrès en tant que tel lui apportera du plaisir. Comme un peu des deux se cachent en nous lorsqu’on débute, je conseille à tous les débutants d’alterner régulièrement entre des exercices purement techniques et des tutoriels plus ludiques, qui permettent de réussir quelque chose de joli tout de suite. L’idéal parmi les tuto ludiques étant un tuto de fleur pour débutant (très prisées les fleurs car on a pas besoin de savoir trop dessiner) ou un cactus, un paysage simple, ceux avec les petits sapins là… (toutes les formes simples, en fait). Par contre viser tout de suite un tutoriel expert ne pourra être que pour le plaisir du défi 🙂 Ce serait une catégorie “casse-cou“, dangereuse pour l’ego, mais dans laquelle beaucoup pourrons trouver leur bonheur. Et puis on fait ce qu’on veut, hein, se mettre des barrières en art serait un comble !
Pendant un cours pour débutants, on voit également rapidement deux catégories, se dégager : les débutants “illustrateurs” et les débutants “aquasensibles”. Ce sont les deux grandes catégories qui vous définirons dans votre relation à l’aquarelle, même après, quel que soit votre niveau.
1. Les premiers, les “illustrateurs“, sont souvent des débutants qui “gouachent”. C’est à dire qu’ils n’utilisent pas les propriétés de l’aquarelle à plein, en particulier sa transparence et ses possibilités de fusion. Ils utilisent leur couleurs souvent en les saturant et en créant des “aplats” de couleurs, ils n’aiment pas perdre le contrôle. Leur erreur la plus fréquente consiste à “pousser les pigments” comme une matière (comme à la gouache, à l’acrylique et à l’huile en fait) et ne pas laisser le temps à l’eau de “faire le boulot” de fusion. Ils interprètent d’ailleurs souvent les “auréoles” comme un échec. Je leur conseille plus particulièrement les tutos sur “comment réussir des lavis uniformes” (halala il faut que j’en filme un vite ;-)).
2. Les seconds, les “aquasensibles” sont rapidement des amoureux de l’eau, ils vont aimer découvrir ce dialogue périlleux qui doit s’instaurer avec l’eau. Ils acceptent de se laisser faire, de rester dans cet esprit de lâcher prise, d’accepter “l’erreur” pour “jouer avec”. Le travail principal des “aquasensibles” est de s’habituer à doser l’eau. La clé est de comprendre que la même quantité d’eau sur le pinceau ne réagira pas de la même manière selon que le papier est plus ou moins humidifié, à coeur et en surface, tout un monde à s’approprier ! J’y reviendrai dans d’autres articles, promis.
Certains débutants illustrateurs, en réalisant des tutoriels, deviendrons des aquasensibles. D’autres resterons des “illustrateurs” et s’orienterons vers une utilisation de l’aquarelle pour sa simplicité d’utilisation, de transport.
Est-ce ce que je fais en tant que débutant, c’est pas mal ?
Désolée, mais répondre à cette question, c’est pas évident. Il faut plutôt répondre aux questions “plaisir” : Est-ce que je me suis amusé ? Ou relaxé ? Est-ce que le processus m’a plu ? Est-ce que j’ai le sentiment d’avoir progressé ? Est-ce que j’ai envie d’en refaire ? Si vous répondez oui, alors je trouve que c’est pas mal !
Est-ce que j’ai envie de le montrer ? C’est une autre histoire. Cela dépend de la capacité d’indulgence / d’accompagnement / de compréhension de votre entourage, pas de vous. La difficulté du médium ne transparait pas dans les aquarelles. N’attendez pas trop des “non aquarellistes”.
Et si vous l’encadriez ? Vous pouvez encadrer votre oeuvre préférée et en changer à chaque fois que vous pensez avoir fait mieux 🙂 mais soyez toujours très fiers de vous et du cheminement que représente votre aquarelle !
Et si vous avez envie d’en refaire, il faut répondre à la question : Qu’est ce que je referai différemment ? Par exemple, est-ce que je laisserai plus de blanc du papier transparaitre la prochaine fois ? Est-ce que j’utiliserai plus ou moins la transparence, les fusions ? Comment est-ce que le sujet important se détachera du reste pour raconter une histoire ?
Retenez que les sujets les plus simples sont parfois les plus réussis.
Comment savoir que je ne suis plus un débutant ?
Et si je ne suis plus un débutant, où est-ce que j’en suis ? Est-ce que je suis un “avancé”, un “expert”, un bon aquarelliste ?
Je dois ajouter une dernière catégorie de débutant avant de répondre, celle des artistes qui débutent à l’aquarelle. Je veux dire ceux qui savent bien dessiner ou qui savent déjà bien manier différents médiums : la gouache, l’acrylique, … Pour ces débutants pas si débutants, une vexation arrive rapidement si le résultat n’est pas au rendez-vous. Pourquoi n’atteignez vous pas votre objectif ? Et bien l’habitude des autres médiums justement. Là encore le tutos techniques de base s’imposent, si si, je vous assure. La compréhension du “mouillé sur mouillé” vs. “mouillé sur sec” et la maitrise des lavis par exemple. Comprendre l’intérêt des glacis (superposition des couches transparentes une fois sèches), tout ça… ça vous changera la vie à l’aquarelle. Vous ne serez plus un “débutant” beaucoup plus rapidement que les autres, c’est sûr. Commencer par l’aquarelle c’est commencer par le plus dur. Enfin moi je trouve. Donc maitriser un certain médium puis passer à l’aquarelle c’est comprendre que l’on dialogue avec l’eau, plutôt qu’avec la matière. Quand notre main a compris ça, c’est fait. On est un aquarelliste avancé, voire un expert directement.
D’un point de vue technique, les aquarellistes “avancés” maîtrisent ces bases. Il leur reste peut-être quelques techniques “pointues” à explorer comme les retraits de blancs sur mouillé ou autre, mais en gros, ils sont habitués à peindre à l’aquarelle. Et surtout, lorsqu’on est “avancé”, on sait appliquer ces différentes techniques à nos tableaux. En tout cas, un projet d’aquarelliste “avancé” contiendra la bonne technique au bon endroit de l’aquarelle… ça peut être, le fond en mouillé sur mouillé et les détails en mouillé sur sec, des réserves de blanc bien prévues à l’avance … Avec un résultat pas toujours comme on l’a prévu mais satisfaisant. Ici ou là on aura été trop rapide ou on aura pas dosé l’eau comme on aurait voulu… C’est encore difficile pour l’aquarelliste “avancé” de “compiler” tout ses savoirs et les mobiliser ensemble pour un projet. Reste qu’au mieux, la différence entre un grand débutant et un aquarelliste se compte en quelques mois pour un “avancé / confirmé”. Ceci étant purement théorique car cela dépend beaucoup de votre emploi du temps et de votre assiduité. Et c’est pas une compét hein, les amis ?
Pour vous aider, parmi les “erreurs” que l’on distinguent dans une aquarelle “avancée” on trouve souvent une distinction entre fond et sujet trop “délimité” ou plus généralement des zones peu “reliées” entre elles, d’autant plus sur les grands formats. Elles peuvent aussi relever d’autres choses que de la maîtrise de l’aquarelle comme le choix des couleurs, la composition ou le plus important d’après moi : la maîtrise des valeurs. Vous aimez parfois tellement la transparence de l’aquarelle que tout est “pastel”, noyé, le sujet manque alors de relief. C’est peut être encore une fois dû à la difficulté du medium et à cette difficulté d’appliquer “tout en même temps”. Prenez du recul sur votre tableau régulièrement. Et forcez vous à faire des études de valeurs. Oui, nan mais moi non plus j’aime pas ça les études, je préfère y aller direct, mais c’est tellement efficace pour “imprimer” le dessin et ses valeurs dans votre main, l’avantage c’est que vous vous occuperez d’autre chose ensuite pendant le travail.
Et un expert alors ? Et bien c’est celui qui est très à l’aise avec la technique. Attention, l’aquarelliste expert peut ne PAS maitriser TOUTES LES TECHNIQUES. En effet, parmi les experts, il y a des “spécialistes“, qui maitrisent parfaitement une technique en particulier, comme les adeptes du “cycle de l’eau” ou les fameux “illustrateurs” dont je parlais plus haut. Je reviendrai sur ces distinctions dans un prochain article. Je dirais que l’essentiel de la définition de l’expert est pour moi de s’être essayé un peu à tout et, à force de pratique, de s’être dégagé un style propre. Ce fameux style reconnaissable qui évolue avec le temps mais qui nous appartient. Qui vient de nos préférences, de nos penchants. Ce style dont on remarque après coup qu’il pointait dès le début en fait ! Pas de secret, la différence entre l’avancé et l’expert c’est la pratique, je dirais bien quelques années quand même.
Voilà les amies et les amis, j’espère que vous avez trouvé quelques éléments de réponses utiles ou inspirants dans ce que je raconte. Soyez indulgents avec vos oeuvres et celles des autres. Encouragez-les et encouragez-vous vous-même, le monde n’en tournera que mieux.
Bravo aux courageuses et courageux qui se sont fait tout l’article. Des bisous pour la peine et à bientôt !