Le cycle de l’eau à l’aquarelle kesako ?
Parce que l’on préfère parfois lire qu’écouter une vidéo, je te mets les sous titre de ma vidéo phare qui détaille le cycle de l’eau ici. Lorsqu’on parle de cycle de l’eau à l’aquarelle en réalité on ne parle pas vraiment d’un cycle infini. Pourquoi je dis cela ? Je t’explique !
Le cycle de l’eau dans la nature c’est tout ce qui arrive à l’eau depuis les nuages jusque dans la mer en passant par les rivières et autres intermédiaires, bref tous ces états de l’eau qui font qu’elle voyage et qui s’enchainent en un cycle infini. Du haut en bas avec la pluie et de bas en haut avec l’évaporation et ainsi de suite.
Le cycle de l’eau à l’aquarelle a un début et une fin. L’état sec du papier c’est le début et l’état sec après utilisation pour l’aquarelle c’est la fin.
Tu peux recommencer ce cycle si tu remouille le papier, sous certaines conditions, et surtout si ton papier est assez solide pour ne pas s’abimer après un certain nombre de cycles. Le papier coton supportant mieux l’eau, tu peux enchaîner plus de cycles avec. Sur le papier coton, cela va te servir à réaliser de nombreux glacis (superpositions de couches transparentes). Sur le papier synthétique, tu pourras faire moins de cycles mais tu pourras plus facilement “lever des blancs”.
Si on rentre dans le détails, les différents états du papier ont un nom. Ils ont été répertoriés en France par Ewa Karpinska (élève de Jean-Louis Morelle en son temps, lequel avait commencé à utiliser ces effets). Et oui, c’est qu’il y en a pleiiiiin !!!! Accroches toi, c’est “coton”.
Quoiiiii? Il n’y a pas que mouillé sur sec ou mouillé sur mouillé ???? On m’aurait menti ?
Ben oui et non, il y a un peu mouillé sur sec, mouillé sur humide, pas super mouillé sur presque sec, tout ça et plus et inversement…
Holalalaaaaa, mais on va pas s’en sortir !
Si tu vas voir, je te donne toutes les clés calmement et puis on simplifie.
Commençons par les différents états du papier, du plus mouillé au plus sec :
- lentille (une goutte d’eau posée sur le papier, pas encore entrée dans le papier)
- miroir (la goutte d’eau est rentrée dans le papier mais forme encore une “piscine” en surface, on a l’impression qu’on pourrait se voir dedans presque) le papier brille beaucoup
- brillant (encore très mouillé, très brillant, mais les grains du papier se voient, le papier commence tranquillement à “boire” l’eau)
- mi-mat (encore un peu brillant mais dans les creux du papier seulement, il faut vraiment faire bouger le papier sous la lumière pour se réaliser qu’il est brillant)
- mat frais (il est presque sec en surface, un peu froid quand tu approches le dos de ta main quand même mais humide à coeur)
- mat sec (sec en surface mais encore humide à coeur)
- sec
Ces différents états du papier produisent chacun un type d’effet précis lorsque tu y apportes une certaine quantité d’eau colorée. Ce qui se corse c’est qu’il y a aussi plusieurs consistances de peintures. C’est bien l’interaction entre état du papier et consistance qui va créer des effets différents. Et c’est EXACTEMENT pour ça que l’aquarelle peut être difficile. D’autant que le timing de séchage varie en fonction de ton papier.
Dans son livre “Aquarelle, La lumière de l’eau”, Ewa Karpinska répertorie ces effets dans un tableau. Mais j’avoue qu’il peut faire peur à un esprit créatif. Ce qui est important c’est bien de comprendre la continuité de ces états et leur existence même.
Chaque artiste finit par retenir les états qu’il arrive à percevoir et ceux qui sont intéressants pour sa pratique. Certains ne retiennent que les trois états suivants : 1. très mouillé – 2. humide à coeur et 3. sec. Ce qui peut laaaaargement suffire pour un initié. Pour ma pratique, l’état 1. lentille et et 2. miroir sont inutiles à distinguer alors que la subtilité est importante pour un artiste qui travaille beaucoup dans l’humide. Le 5. mat frais c’est mon état préféré, celui pendant lequel tu peux lever les plus beaux blancs sur mon papier préféré. Le 4. mi-mat c’est un peu tôt, les blancs se “referment” et le 6 mat sec c’est trop tard, ça fait des traces moches. Alors que cet état mat frais c’est celui que la planète aquarelle décrit comme l’état de tous les dangers, car c’est celui où tu as le plus de risque d’auréoles.
Avant de parler d’interaction entre états du papier et consistance, il faut citer les différentes consistances de peinture.
Ewa K. en cite 3 : très diluée (très mobile dans une flaque), crémeuses (assez dense et fort en couleur mais le pinceau “goutte”) et pâteuses (ce que j’appelle “sortie de tube”).
Mais comme je veux être complète, je vais plutôt te donner mon classement actuel, qui est plus détaillé, du plus dilué au moins dilué et qui s’inspire largement du système de l’horloge de Joseph Zbukvic :
- jus clair (consistance de tisane, très clair, très mobile dans une flaque, très transparent, pas beaucoup de couleur)
- jus (consistance du thé au lait, très liquide et mobile dans une flaque mais un peu plus coloré, transparent)
- liquide (comme du lait au chocolat, toujours relativement transparent à l’application, commence à glisser moins vite sur la palette quand tu la bouge)
- crémeux (comme de la crème fraiche, bouge beaucoup moins sur la palette penchée, peu ou pas transparent)
- pâteux – sortie de tube (comme du beurre, ne goutte pas), c’est possible de l’avoir en godet en insistant en frottant plus longtemps le godet au pinceau avec de l’eau mais c’est pas toujours gagné selon la marque.
Je sais. Tu es en train de te dire mais elle est dingue, je vais jamais retenir tout ça. Non. La première fois que je l’ai lu il y a 20 ans, je ne l’ai pas retenu. Il faut le ressentir. Se lâcher pour ne plus avoir peur de noyer sa feuille, recommencer, rater. Et alors après quand tu relis, tu te dis OK je reconnais cette phase là. Et puis plus tard, oui, je vois ce qu’elle veut dire. Comme le peuple esquimo qui a plus de 50 termes pour désigner la neige, il vit dedans n’est-ce pas. Si les esquimos te donnent 10 de ces termes, avec une explication, il te faudra peut-être un peu de temps pour mettre le tout en relation, oui, et bien là il faut un peu faire pareil du coup.
OK, OK donc, Félicia, ça existe le cycle de l’eau. Et il faut aussi tenir compte du fait que différentes consistance de la peinture existent aussi. Mais en pratiiiiiique, je fais quoi ?
Et bien déjà je te donne LA REGLE ultime et SIMPLE pour ne pas mettre le bazar dans son travail c’est de toujours mettre moins d’eau que ce qu’il y a dans la couche précédente. Il faut essayer de peindre du plus liquide au moins liquide au fur et à mesure que ça sèche pour ne pas créer de “tâche” de piscine (les auréoles – en forme de choux fleurs). Pendant un cycle je vais peindre de 1 à 5, et puis je recommence (classiquement je veux dire n’est-ce-pas, je simplifie).
Je dois préciser que, que je commence avec une flaque d’eau ou un jus, c’est à peu près pareil : c’est mon premier dépôt d’eau qui débute le cycle de l’eau. Colorée ou pas, c’est bien cela qui mouille le papier.
Une autre précision importante : l’état du papier varie d’un endroit à l’autre. Même si tu as eu l’impression de mouiller une grande surface uniformément pour ensuite y faire un lavis (une large application uniforme de couleur) sur mouillé, il est possible que le séchage ne soit pas uniforme. Il faut bouger tranquillement ton support dans tous les sens (comme un tamis) pour qu’une flaque d’eau se répartisse correctement en s’imprégnant dans le papier puis en séchant. Essaie, ça peut te sauver un ciel !
Par ailleurs, le cycle peut tout simplement ne pas en être au même point sur différentes zones. Un débutant peindra zone après zone pour ne pas être perdu et maitriser le niveau d’humidité de sa zone en cours. Un maitre sera capable de 1. couvrir de très larges zones. et 2. de peindre plusieurs zones avec plusieurs niveaux d’humidité différents en même temps et même 3. de faire se rencontrer ces zones et de contrôler leur fusion. Donc si tu t’en tiens à une maitrise parfaite de petites zones, sans te mettre en danger sur de grandes zones, tu ne progresse pas. Il FAUT galérer à faire entrer en fusion des zones de plus en plus grandes avec des pinceaux de plus en plus grands pour forcer sa main à comprendre tout ça au fur et à mesure.
Et d’ailleurs, en parlant de ça, et les fusions ? La fusion entre deux couleurs va s’effectuer quand l’état des deux “flaques” sont à humidité similaire (ou relativement similaire, hein, on est pas des ouf non plus).
Parce que que se passe t il si une flaque colorée contient plus d’eau qu’une autre ? Et bien elle repousse le pigment, qui s’il n’est pas déjà “descendu” dans le papier, va voyager.
En effet, pour comprendre l’interaction entre l’état du papier et la consistance de la peinture, il faut comprendre que l’on parle de pigments qui naviguent dans des flaques, qui lorsqu’elles sont absorbées par le papier, amènent le pigment qu’elles contiennent au fond du papier. Si il n’y a plus d’eau, c’est sec, le pigment reste au fond du papier.
Pour te simplifier la compréhension physique de ces phénomènes, il faut que tu fasse un petit exercice mental. Tu imagine de très grandes flaques ça te facilitera la chose. Commence par une piscine. Si je jette un seau d’eau colorée en rouge dedans, le rouge va se répandre en tout sens. Si tu jette un gros seau de peinture, il va se répandre mais moins loin et moins vite. Et bien c’est exactement pour ça que lorsque je mets du jus dans du brillant, ça s’éparpille dans tous les sens, et que quand je mets de la couleur crémeuse dans du brillant ça va moins loin.
Voili voili, j’espère que ces sous titre vont t’aider, n’hésite pas à les copier pour te faire une prise de note personnalisée. Je n’ai pas copié les apparté que je t’ai mises en note sur fond foncé dans la vidéo, n’hésite pas à faire “pause” à ces moments bien sûr.
Dernière chose, si tu es élève de mon cours digital l’aquarelle s’amuse et que tu te poses la question, c’est bien l’exercice des palmiers la référence à travailler pour la consistance de la peinture. A très bientôt !